Le 11 février 2021, l'International Land Coalition Afrique (ILC Africa), l'Open Society Initiative for Eastern Africa (OSIEA) et le Rights and Resources Initiaitve (RRI) ont procédé au lancement du nouveau rapport sur la criminalisation des défenseurs des droits fonciers et de l’environnement en Afrique de l'Est. Le rapport met en lumière les crimes commis et recommande des mesures que les gouvernements et autres parties prenantes devraient prendre pour mieux protéger lesdits défenseurs.
Intitulé « Payer le prix: une étude sur la criminalisation des défenseurs des droits fonciers et de l’environnement en Afrique de l'Est », le rapport restitue les résultats d’enquêtes sur les différentes formes de criminalisation contre les défenseurs des droits fonciers et de l’environnement, notamment les accusations de crimes graves sans base légale, les arrestations illégales, les procédures pénales dilatoires, l’utilisation abusive du terrorisme contre eux, les diffamations, l’accusation desdits défenseurs de recevoir des financements étrangers, etc.
Le rapport a ensuite révélé que la criminalisation des questions foncières et environnementales, entre autres, met les défenseurs de ces droits en danger en abusant et en violant leurs droits et ceux des communautés qui leur apportent de l’aide ou les encouragent.
"Nos résultats montrent que les défenseurs des droits fonciers et de l’environnement sont soumis à plusieurs violations, dont certaines sont historiques comme les éleveurs Loliondo en Tanzanie et les peuples autochtones au Kenya", a déclaré Ivan Okuda, avocate / journaliste indépendant et auteur du rapport en Ouganda.
Lors du lancement virtuel, la professeure Patricia Kameri-Mbote, directrice de recherche auprès du programme Afrique du Centre de recherche sur le droit international de l'environnement au Kenya a souligné que le regain d'intérêt pour la terre est une autre forme de violation imposée aux défenseurs.
«L'intérêt pour la terre est devenu complexe car de nos jours, il existe des liens entre la terre et le capital mondial. Protéger la terre, c'est comme marcher sur les gros orteils », ajoute-t-elle.
Points clés émergeant de la recherche
- Les projets d'infrastructures et les efforts de conservation des gouvernements de la région alimentent les conflits fonciers ;
- Les peuples autochtones au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie sont constamment confrontés aux intérêts commerciaux des Etats et autres acteurs du secteur privé ;
- Bien que les organes et institutions de l'État interviennent activement dans la médiation entre les défenseurs des droits fonciers et de l’environnement lésés et les intérêts commerciaux, ils semblent ne pas répondre aux besoins urgents des premiers ;
- Alors qu'il existe des stratégies et des efforts de la société civile pour soutenir lesdits défenseurs, nombre d'entre eux sont parfois impuissants, avec des ressources limitées ;
- À mesure que les investissements fonciers dans la région augmentent, la pression monte sur les ressources foncières et il en va de même pour leurs défenseurs ;
- Le soutien juridique disponible pour les défenseurs est limité, ce qui les expose davantage à engager seuls les combats en faveur de la protection des terres et de l’environnement.
Le rapport recommande que :
- Les gouvernements des Etats en Afrique de l'Est devraient prendre en charge les revendications territoriales en cours ainsi que les inégalités foncières pour aider les peuples autochtones à recouvrer leurs droits fonciers et environnementaux ;
- Les gouvernements et les organisations de la société civile (OSC) devraient veiller à ce que toutes les entreprises respectent le principe du consentement libre des peuples autochtones à toutes les phases des projets ;
- Les gouvernements et les OSCs devraient faire preuve de diligence raisonnable sur les opérations commerciales proposées afin de garantir un environnement adéquat, et que des études d'impact social préalables soient effectuées avant l’installation ;
- Les gouvernements devraient condamner publiquement toute menace contre les défenseurs des droits fonciers et de l’environnement et traduire en justice tous les contrevenants ; veiller à ce que les politiques nationales soient conformes aux droits des défenseurs; prendre des dispositions contre la corruption foncière; et assurer la protection des défenseurs, notamment leur intégrité physique et psychologique ;
"Il devrait y avoir une solidarité entre les défenseurs au niveau local. Les peuples autochtones doivent être compris comme ils sont et non comparés aux personnes vivant dans la pauvreté", a déclaré Audace Kubwimana, coordonnateur régional de l’ILC Afrique.