Alors que nous commémorons la Journée internationale de lutte contre la corruption (9 décembre) et la Journée internationale des droits de l'homme (10 décembre), nous mettons en lumière cette question urgente. En nous appuyant sur le rapport de Transparency International, This Beautiful Land: Corruption, Discrimination, and Land Rights in Sub-Saharan Africa et les récits de terrain de l'ILC Afrique, nous explorons comment la corruption prive les populations vulnérables d'Afrique de leurs terres, de leurs moyens de subsistance et de leur dignité, et ce qui doit être fait pour récupérer la justice.
Histoires du terrain : Le coût humain de la corruption foncière
Jeunesse : Un avenir en péril
La corruption empêche les jeunes d'hériter des terres, de sécuriser leur avenir économique et de façonner leurs communautés.
En Zambie, la politique nationale en matière de terres réserve officiellement 20 % des terres de l'État aux jeunes. En pratique, cependant, les jeunes demandeurs sont souvent mis à l'écart. Les stéréotypes les présentant comme inexpérimentés ou improductifs conduisent à leur exclusion des processus d'attribution de terres d'État ou coutumières. Par exemple, les chefs traditionnels peuvent considérer les jeunes comme moins méritants de parcelles, rejetant leurs demandes au profit des demandeurs plus âgés ou de personnes influentes.
Dans la région d'Insuza au Zimbabwe, la lutte pour la terre a poussé de nombreux jeunes à migrer ou à s'impliquer dans des transactions foncières illicites. Des injustices similaires ont été signalées au Kenya, où des jeunes ont perdu leur héritage légitime lorsque les aînés du village ont profité de l'absence du patriarche de la famille. Le déplacement entraîne souvent la migration des jeunes vers les centres urbains ou d'autres zones rurales, où ils sont confrontés à des marchés du travail précaires et à des opportunités limitées. La corruption menace un droit générationnel d'accès aux terres communautaires, créant un cycle de pauvreté et de déplacement.
Femmes et filles : L'impact genré de la corruption foncière
Le patriarcat systémique aggrave l'impact de la corruption foncière sur les femmes et les filles.
En République Démocratique du Congo (RDC), les systèmes fonciers coutumiers marginalisent les femmes, les empêchant de faire valoir leurs droits légaux à l'accès à la terre et les exposant à des expulsions forcées. De même, en Tanzanie, les femmes touchées par le projet du pipeline East African Crude Oil Pipeline (EACOP) ont perdu l'accès aux terres de pâturage communautaires et aux plantes médicinales essentielles à leurs moyens de subsistance. Sans titres fonciers formels ni compensation équitable, elles restent piégées dans la dépendance économique et l'insécurité alimentaire.
Les moyens de subsistance et les pratiques culturelles des communautés menacés
Des communautés entières à travers l'Afrique ont vu leurs droits humains violés à cause de la corruption foncière.
Des villages affectés par le pipeline EACOP en Tanzanie aux communautés agricoles spoliées du Sénégal, le déplacement laisse des millions de personnes sans abri, sans travail ou sans accès aux services essentiels tels que l'eau, la santé et l'éducation. La corruption dans la gestion foncière déstabilise les économies locales et perturbe les pratiques culturelles.
Le chemin à suivre : Aborder la corruption foncière comme une question de droits humains
Lutter contre la corruption foncière nécessite une action coordonnée dans plusieurs domaines clés :
Renforcer les cadres juridiques et les protocoles opérationnels, et assurer une mise en œuvre stricte
Les gouvernements doivent garantir l'application stricte des lois et politiques existantes tout en s'efforçant de les aligner sur les normes internationales en matière de gouvernance foncière, telles que le cadre et les lignes directrices de l'Union africaine sur la politique foncière en Afrique. Les gouvernements doivent mettre en place des procédures opérationnelles solides, y compris garantir le consentement libre, préalable et éclairé des communautés concernées et assurer un accès égalitaire et non discriminatoire à la terre.
Promouvoir la transparence grâce aux registres fonciers complets
Les processus d'acquisition foncière transparents doivent inclure des registres fonciers accessibles au public. Ces registres doivent être gratuits, utiliser un langage clair et simple, fournir des informations détaillées sur les critères clés, offrir un accès en ligne et hors ligne, respecter les principes des données ouvertes et être soutenus par de solides campagnes de sensibilisation.
Impliquer les communautés locales, les jeunes et les femmes
Des programmes de sensibilisation et de formation juridique doivent cibler les communautés affectées, les jeunes et les femmes pour renforcer leur capacité à défendre leurs droits fonciers. Cela peut prendre la forme d'initiatives telles que l'École de l'Intégrité de Transparency International Zimbabwe pour les jeunes leaders émergents, qui vise à doter les jeunes des compétences nécessaires pour lutter contre la corruption.
Des systèmes peuvent être mis en place pour garantir que les communautés locales, les jeunes et les femmes aient accès à des conseils juridiques et à des mécanismes de recours. Cela peut inclure des Centres de Plaidoyer et de Conseil Juridique (ALAC) qui permettent aux citoyens de signaler les cas de corruption foncière et d'orienter ces cas vers les autorités compétentes afin de promouvoir la justice foncière.
Appel à l'action : Unissons-nous pour une gouvernance foncière sans corruption
La corruption foncière n'est pas inévitable, elle prospère en l'absence de responsabilité. En ces dates importantes, nous appelons les gouvernements, les entreprises, les partenaires de développement, les organisations de la société civile et les communautés à poursuivre leurs actions audacieuses pour promouvoir des systèmes de gouvernance foncière sans corruption.
Rejoignez-nous, l'ILC Afrique et Transparency International, pour amplifier la voix des communautés locales d'Afrique, des jeunes, des femmes et des filles. Ensemble, nous pouvons élaborer des politiques, des partenariats et des pratiques qui restaurent la justice, l'équité et la dignité humaine.