Les communautés de toute l’Afrique francophone luttent contre les pouvoirs publics et les entreprises privées pour préserver leurs droits historiques à la terre. Un outil foncier inclusif élaboré par le Réseau mondial des instruments fonciers (GLTN) aide les communautés à définir les frontières de leurs territoires et à protéger leurs droits.
« Envoûtant », « pittoresque », « apaisant » sont quelques-uns des termes employés pour décrire les paysages de Niayes, dans le nord-ouest du Sénégal, où vit Papa Amadou Ndiaye, un agriculteur trentenaire qui subsiste grâce à la terre. Si son exploitation assure un revenu à sa famille, elle constitue également de plus en plus une source de préoccupations. La construction de l’aéroport international Blaise Diagne à 30-40 km de Niayes exerce en effet une pression sur ses terres et, en l’absence de documentation, il craint de les perdre.
La sécurité foncière constitue l’une des principales préoccupations de nombreuses personnes vulnérables en Afrique. Près de 70 % des terres rurales du continent ne sont pas protégées par des documents officiels, et l’absence de documentation appropriée est souvent source de litiges fonciers. Si de nombreux pays se sont dotés de systèmes d’administration foncière, ceux-ci ne parviennent pas toujours à aider les personnes à sécuriser leurs terres.
Afin de renforcer les droits fonciers et de propriété en Afrique francophone, l’ILC s’est associée au Réseau mondial des instruments fonciers (GLTN) et a organisé, du 10 au 12 décembre 2018 à Dakar, au Sénégal, une formation sur l’outil Social Tenure Domain Model (STDM).
STDM est un système d’information foncière participatif, favorable aux pauvres et sensible au genre, dont l’application vise à assurer la sécurisation universelle des droits fonciers.
Vingt experts des questions foncières issus du Cameroun, du Sénégal, de la RDC, du Togo et de Madagascar ont appris, à l’occasion de cette formation, à manipuler l’outil STDM et à l’appliquer sur le terrain pour aider les populations à sécuriser leurs terres.
Le GLTN et l’ILC ont également invité des experts du Kenya et du Burkina Faso à partager leur expérience en matière d’application du STDM dans leurs pays respectifs.
M. Ken Otieno, coordonnateur technique au Resource Conflict Institute (RECONCILE), a testé cette approche dans le cadre de projets mis en œuvre au Kenya : « l’outil peut être adapté en fonction de s’il est appliqué dans une zone rurale ou urbaine, et en fonction des besoins des bénéficiaires… », a-t-il expliqué aux participants. RECONCILE a adapté l’outil dans le but de renforcer les droits fonciers dans trois comtés du Kenya.
« L’outil STDM appuiera notre stratégie visant à encourager l’élaboration participative de titres fonciers pour les terres communautaires du pays », a expliqué Michelle Sokoue, facilitatrice de la stratégie nationale du Cameroun.
À la fin de l’atelier, les experts formés ont élaboré des plans d’action pour assurer le partage des connaissances acquises avec leurs plateformes nationales respectives, ainsi qu’une proposition d’utilisation de l’outil STDM pour soutenir la gouvernance foncière dans leurs pays.
En collaboration avec le GLTN, l’ILC espère aider les pays d’Afrique francophone à exploiter le STDM pour renforcer la sécurité foncière. En 2019, elle aidera deux pays à mettre en œuvre l’outil et mettra sur pied une communauté de pratique consacrée à cet outil couvrant toute l’Afrique francophone.